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tionner sa mère sur la demoiselle alchimiste ; mais, comme je connaissais un peu M. de Montroger, j’amenai naturellement la conversation sur son compte.

— C’est un excellent homme, répondit ma tante, et je suis certaine que nous aurons là un bon voisin, peut-être un ami. Il est froid et sérieux, mais dévoué, actif, aimé dans le pays, estimé de tout le monde.

— Alors, vous pensez peut-être… ?

— À le marier avec Erneste ? Eh bien, non, je n’y pense pas du tout. Un homme qui a été raisonnable jusqu’à sa quarantième année ne fera jamais la folie de choisir pour compagne une enfant si fantasque. Je sais, d’ailleurs, qu’il a trouvé mainte fois de meilleures occasions, et qu’il n’a jamais voulu aliéner sa liberté. Enfin je vois de reste que, voulût-il de nous, Erneste le trouverait trop mûr et trop sérieux. Ce n’est donc pas à ce mariage-là que je pense.

— Avez-vous quelqu’un en vue pour elle ?

— Oui, le fils aîné du receveur général des finances, dont on m’a dit le plus grand bien et qui cherche une femme dans les conditions de naissance et de fortune où nous sommes. Nous le verrons demain chez notre grande voisine. Garde-toi bien de donner l’éveil à Erneste, elle serait coquette ou maussade. Tâchons qu’elle soit elle-même et ne se doute de rien.

— Fort bien ; mais qui appelez-vous votre grande voisine ?

— Ah ! c’est vrai, j’oubliais de te dire… C’est une personne très-intéressante et très-remarquable, encore jeune et belle, petite-fille de feu l’amiral Merquem, très-riche, très-excentrique, il faut l’avouer, mais d’une excentricité dont on ne peut médire, car sa vie est irréprochable. Elle professe l’amour absolu de l’in-