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d’aujourd’hui, retourner chez vous. Il faut dormir là-dessus. Votre tante ne vous attendra pas, un exprès lui a été expédié de votre part pour lui dire que M. Stéphen vous garde jusqu’à demain. Obéissez et dormez bien, je le veux ; ayez soin de lui, mes Guillaume, et au revoir, monsieur Stéphen !

Elle nous serra la main à tous et disparut sous les ombrages du parc, où le vieux gardien l’attendait avec une lanterne. Je restai cloué à ma place.

M’aimait-elle ? me plaignait-elle seulement ? Peut-être jouait-elle avec l’amour comme avec l’inconnu, se flattant de me guérir aisément par sa candeur et par sa bonté.

Stéphen me prit le bras pour m’emmener. N’étant plus soutenu par la présence de Célie, je me sentais brisé de fatigue et accablé de stupeur. Je n’eus même pas l’idée de résister à l’ordre de passer la nuit chez Guillaume. Je compris à peine ce que me dit Stéphen de l’état du Brésilien. Il me céda son lit et alla dormir avec Célio. Pour moi, je tombai accablé sur l’oreiller d’algues, et ne m’éveillai qu’après le lever du soleil.

J’étais guéri, la plaie était cicatrisée sans inflammation et sans fièvre. Je me rappelais confusément les événements et les émotions de la veille ; mais je n’eus pas le loisir d’y rêver longtemps. Stéphen entra chez moi, me regarda et dit :

— C’est bien, vous avez le sang pur et vous êtes jeune. Il faudrait plus d’un coup comme ça pour vous assommer. Habillez-vous pendant que je vous dirai ce qui se passe.

Il me raconta que le Brésilien était parti avant le jour dans une voiture de poste que, dès la veille au