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il s’est laissé griser. Jusqu’à la nuit, il a babillé avec ces gens-là, et, le soir venu, il les a emmenés, devinez où ? dans le vieux château, où la demoiselle a la complaisance d’aider M. Bellac à nous donner l’instruction. Ils se sont mis tous trois dans un coin où Barcot a dormi sans que sa marraine ait pu s’en apercevoir. Elle n’a pas fait attention non plus aux deux étrangers, et on ne peut pas dire qu’ils se soient mal conduits pendant la leçon ; ils n’ont point bougé, ils n’étaient pas ivres, mais ils regardaient la demoiselle un peu sottement et paraissaient être venus là non point pour profiter du cours, mais pour contenter leur envie de la voir. Quand on s’est retiré, sur les neuf heures du soir, ils ont passé avec les autres, et on les a vus s’en aller par le sentier qui mène à la ville, et qui est l’opposé de celui de Saint-Pierre. Ceci a donné des soupçons. On ne pouvait questionner Célio Barcot, qui dormait tout debout et ne paraissait se souvenir de rien ; mais, le lendemain, on lui a vu une belle montre en argent avec une chaîne, et, quand on lui a demandé où il avait péché ça, il n’a su le dire. Il faut bien qu’il l’ait reçue en cadeau des étrangers pour les avoir amenés au cours. D’un autre côté, Michelon, le cabaretier, nous a dit qu’ils parlaient tout drôlement, un surtout qui avait l’accent d’un Espagnol et les mains blanches d’un feignant. Il faisait sonner l’or qu’il avait sur lui, comme un homme sot, ou comme un riche de la veille. Quant à moi, qui les ai bien regardés pendant la leçon, je peux dire que leurs figures ne me reviennent point. L’un a l’air bête, l’autre a l’air insolent, et je ne pense pas qu’ils soient venus pour faire quelque chose de bien. Donc, le gars est fautif. Je veux croire qu’il ne s’est pas méfié ; mais