Page:Sand - Mademoiselle Merquem.djvu/118

Cette page n’a pas encore été corrigée

— Oh ! là-dessus, je vous défie ! j’aime passionnément quelqu’un aujourd’hui.

— Qui donc ?

— Vous.

— Miséricorde ! passionnément ? et pourquoi cela ?

— Parce que j’ai passé quatre heures à la Canielle.

— Ah ! oui ; je vois : vous avez entendu mes amis dire que je suis un ange ! Je dois cette auréole à mon grand-père.

— Je sais tout.

— Tout ? dit-elle en riant avec une ingénuité malicieuse. Alors, vous avez vu l’enfant ?

— L’enfant ? Ah ! oui, l’enfant de madame de Malbois ! Eh bien, je ne l’ai pas vu. Je n’ai même pas songé à lui, et, s’il faut l’avouer, je n’ai demandé à personne comment vous l’aviez sauvé.

— Je l’ai sauvé en lui jetant une corde, ce n’est pas plus malin que cela. Quatre personnes très-fortes ont tenu la corde, l’enfant et moi. Je ne peux pas vous faire un beau récit. Quand on est dans la vague furieuse, on ne voit que ce qu’on fait et on n’entend que ce qu’on pense. On est plusieurs qui pensent, qui voient, qui veulent, et qui font spontanément la même chose. Les impressions poétiques, les dialogues animés, le pittoresque et le dramatique de la chose sont absolument perdus, et, après cela, il y a tant de fatigue, qu’il n’y a pas d’émotion rétrospective. On rentre chez soi et on dort.

— Dites tout ce que vous voudrez pour me persuader que vous faites vulgairement les choses les plus vulgaires. Si vous n’étiez pas parfaite, je croirais qu’il y a là un peu d’affectation ; mais de votre part c’est impossible. À force de vous faire méconnaître à