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Mademoiselle Merquem n’avait introduit qu’une amélioration à ce système. Elle ne s’était pas contentée pour ses amis rustiques de l’instruction donnée par le maître d’école. Elle avait voulu diminuer leur superstition et leur fatalisme en leur donnant des notions de science. Tous les jeudis soir, M. Bellac leur faisait un cours élémentaire dans le vieux donjon. Tantôt c’était sur l’histoire naturelle relative à la mer, à sa végétation et à ses habitants, tantôt sur la physique et sur les lois qui régissent le ciel et les ondes. Comme on était richement outillé au donjon, ces leçons de physique étaient accompagnées d’expériences qui parlaient aux sens et ouvraient de force les cerveaux que le raisonnement n’eût pas persuadés. Mademoiselle Merquem assistait à ces séances, et, si par hasard M. Bellac était un peu trop technique, elle se chargeait d’expliquer la leçon dans des termes plus vulgaires. Elle se faisait toujours comprendre, et les bonnes gens en concluaient qu’elle en savait plus long que le professeur.

Pour tout le reste, Célie se conformait au programme tracé par son grand-père, autant par conviction que par respect pour sa mémoire. Elle pensait comme lui que l’on a trop bouleversé l’existence et transformé le caractère de l’ouvrier, et que par là on lui a ôté des vertus et des qualités essentielles. Ceci me fut très-bien expliqué par Célio Guillaume, en qui je découvris une très-saine intelligence et une manière de s’exprimer très-sage et très-claire, sans qu’il eût rien perdu de l’accent et de la couleur de son langage rustique. La demoiselle disait que l’on s’était trompé en pensant que le déplacement des aptitudes est un moyen de progrès. On avait pris le changement pour l’essor,