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travaillai sincèrement à combattre le démon d’orgueil qui était en moi.

Outre le travail de la grâce, j’étais doué d’un besoin de logique intérieure qui me travaillait aussi. J’avais le goût du beau, la passion du vrai, le sentiment de l’honneur, le mépris des faux biens, de grands appétits de franchise et de générosité ; mais la vraie charité chrétienne, le facile pardon des injures, l’humilité devant les hommes, le repos absolu du cœur et des sens à la pensée des femmes, voilà ce qui me manquait. Je le sentais, car j’étais sévère envers moi-même. Je demandai encore un an de travail spirituel avant de prononcer mes vœux, je ne me trouvais pas encore assez digne et assez fort ; mais on avait besoin de mes services, on me dissuada de tenter une plus longue épreuve : je me consacrai en tremblant.

Pourtant je me sentis à la fois enorgueilli et touché de la confiance avec laquelle mes directeurs me poussaient dans l’arène. L’orgueil du devoir m’était permis, je m’y abandonnai : n’était-il pas ma sauvegarde contre les tentations ?

Je fus nommé d’emblée à un vicariat dans une ville de premier ordre. J’y prêchai le carême avec un très-grand succès. C’est là que les larmes des femmes, ces touchantes ferveurs, plus séduisantes que les applaudissements des foules, commencèrent à me troubler sérieusement. Je sentis la nécessité des plus grandes austérités. Il fallait être saint ou rien. Je m’efforçai d’être saint.

La grâce descendit encore sur ma ferveur. Le calme se fit comme par miracle. Un jour, je me sentis vraiment fier en me sentant vraiment fort. Le souffle embrasé du confessionnal me fit sourire. Les plus belles femmes venaient à moi. Toutes m’aimaient, sinon avec réflexion et persistance, du moins avec entraînement durant cette