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Il se retira, et Lucie, héroïque et tendre avec son grand-père, l’embrassa en souriant.

« Ne vous tourmentez pas, lui dit-elle ; ceci est le paroxysme de l’énergie de mon père. Vous savez bien qu’après les grandes explosions, les grandes lassitudes le prennent. Encore quelques jours de patience, et il cédera. »

Mais, quand elle eut reconduit le vieillard à sa chambre, elle revint à M. Lemontier, et se jetant dans ses bras, elle fondit en larmes.

« Mon ami, je crois que tout est perdu, lui dit-elle. Si l’abbé est parti, c’est parce qu’il s’est assuré que mon père ne faiblirait plus.

— Courage ! lui répondit M. Lemontier ; je n’abandonne pas la partie, moi ! »

Le général n’avait pas la dose de fermeté que lui attribuait Lucie, et l’abbé n’avait point compté qu’il l’aurait. Il avait tourné l’obstacle, il s’était réservé d’agir seul.

Le lendemain matin, Lucie apprit avec stupeur que son père était parti dans la nuit. On lui remit une lettre de lui ainsi conçue :


« Ces luttes me fatiguent et me dégoûtent. Je retourne à mon poste, où le devoir me réclame. Puisque vous avez disposé de votre cœur sans mon aveu, je cède, mais sous une condition expresse : M. Lemontier quittera le château de Turdy, et vous entrerez aux Carmélites. Vous y passerez un mois dans une claustration absolue. Si, après ce temps écoulé, à l’abri des mauvais conseils et des funestes influences, vous persistez dans votre choix, je vous donne ma parole de n’y plus apporter d’obstacles.

« À.-G. La Quintinie. »


Lucie eut d’abord un élan de joie ardente, puis une