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ci comme un ton de blâme et d’amertume, et, je veux vous le dire avec la franchise à laquelle vous m’avez autorisée, des expressions qui me blessent, des idées que je ne connais pas. J’y vois bien votre constante sollicitude pour moi, le zèle que vous avez pour mon salut, la ferveur enthousiaste de votre piété ; mais la délicatesse de votre amitié fraternelle, la charmante pureté de votre entretien paraissent avoir souffert, de vos préoccupations, quelque atteinte singulière qui me contriste sans que je puisse dire pourquoi. J’examine ma conscience, et je ne la trouve pourtant pas si coupable. Je m’interroge avec crainte, et je ne sens rien de déchu dans mon être, rien de souillé dans mes pensées. Vous me reprochez une réserve prudente qui n’est pas dans mon caractère, et que le mystère dont vous entourez votre présence me commandait absolument. Je ne sais rien feindre, et je vous avoue qu’en parlant de la sieste de ma bonne tante, je ne songeais pas du tout à vous avertir d’en profiter. Ce que j’attendais, moi, dans cet entretien plein de contrainte que nous avons eu devant elle, c’est qu’il vous vînt l’idée de lui confier le nom sous lequel je vous ai connu jusqu’ici. Ce nom, que je lui ai souvent répété en lui faisant part de vos lettres, lui eût expliqué notre liaison. Ma tante est faite pour garder un secret, et j’eusse trahi le vôtre sans inquiétude, si vos regards n’eussent exprimé une méfiance et une crainte particulières. Laissez-moi vous dire, mon ami, que, si je respecte les mystères de nos dogmes sacrés, je n’aime pas ceux qui ne tiennent qu’aux intérêts de l’Église. À coup sûr, vous vous êtes dévoué à une œuvre de propagande dont le résultat doit être selon Dieu ; mais quel est donc le bien qu’on ne peut pas faire ouvertement ? Ces allures de conspirateur conviennent-elles à un homme de votre caractère ?