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là-haut. Le vieux berger, ou bien le garçon que voici (elle me désignait) nous servira de guide, et je marcherai. Voyons, cher ami, consentez.

— Oui, avec un guide pour vous soutenir ; mais le berger est trop vieux, et ce jeune garçon n’est pas guide non plus.

— Ceci ne fait rien, répondis-je, je peux guider sur le pic de Bergonz où il n’y a pas de danger sérieux à courir pour les voyageurs.

Pourquoi je fis cette réponse qui devait décider de ma destinée, je l’ignore. Il y a des moments où nous n’avons pas conscience de l’impulsion qui nous est donnée. Cette impulsion me venait du regard engageant et enjoué que la jeune dame attachait sur moi. Je reçus avec un mouvement de surprise, aussitôt réprimé, le paletot et le parasol que l’Anglais jeta négligemment sur mon épaule, et je me mis à marcher en avant.

J’étais piqué par je ne sais quelle curiosité en même temps que je subissais je ne sais quelle fascination. Cette jeune femme me rappelait l’émotion que j’avais, ressentie à Bordeaux en voyant, pendant deux ou trois secondes, la charmante figure de Manuela Perez. C’était, autant que je pouvais m’en souvenir, un type de même famille, ni grande ni petite, un peu maigre,