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de partis pris. Loin de redresser dans notre maturité les erreurs de notre inexpérience, elle s’empare de nos croyances ou de nos passions au profit des siennes quand elle ne nous sacrifie pas à de plus étroits intérêts.

Telle ne furent pourtant ni ma destinée ni celle de mon ami, et, si j’ai fait mention de nos amicales querelles, c’est qu’en songeant au dénoûment imprévu qu’elles amenèrent pour lui, je ne puis me défendre d’en rire un peu.

Au bout de nos cinq années d’études, nous fûmes reçus médecins, Vianne et moi, le même jour ; il avait vingt-six ans, j’en avais vingt-quatre. Il vint alors avec moi à Pau, en me confiant qu’il avait l’intention de faire sa cour à ma sœur, si elle ne s’y opposait pas par une déclaration formelle. Je n’espérais pas beaucoup pour lui. Jeanne, à vingt et un ans, était la même qu’à dix-sept, plus belle et plus grande musicienne encore, mais ajournant l’idée du mariage sans hésitation ni regret. Ma mère respectait toujours sa volonté à cet égard et n’insistait pas. Vianne était pourtant le meilleur parti qu’elle pût jamais espérer. Il était si bien posé à Montpellier, qu’il devait sans effort s’y faire promptement une bonne clientèle. Il avait des ressources personnelles, ni père ni mère pour discu-