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» — Mais pourquoi M. Vianne, si froid, si positif, si posé ?…

» — Justement ! Il a tant raillé la passion devant elle, qu’il a rallumé l’invincible passion qu’éprouvent la plupart des femmes de vaincre celui qui résiste. Il a beaucoup blâmé Laurent d’avoir ingénument joué ce rôle d’amorceur et d’avoir succombé. Il a joué encore plus candidement le même rôle et il a succombé plus complétement. Cela est dans la nature ; on peut rire de ce que la nature a de comiquement fatal, mais il n’y a point à s’en fâcher. Croyez-moi, mon amie, tout ici est pour le mieux. Votre fils eût épousé Manuela par point d’honneur. Il eut été victime d’une velléité ; Vianne agit plus résolûment ; il enlève à la veille du mariage, il obéit à une passion véritable d’autant plus violente qu’il a plus refoulé et raillé la passion en lui-même. C’est un très-honnête homme ; il n’y a pas de raison pour que Manuela ne soit pas heureuse, n’y songeons plus. À présent, je vous appartiens pour toujours. Écrivez à mon cher Laurent que je l’ai toujours tendrement aimé et qu’il n’y aura, Dieu merci ! plus jamais de femmes entre nous. J’irai où vous voudrez, mon chalet auprès de votre ville m’attend. Rien ne s’oppose à ce que nous partions ensemble.

» Voilà, mon enfant tout ce qui s’est passé et où