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connu Jeanne pour sa fille avant de rien savoir. Aussitôt que tu lui eus rappelé mon nom, il résolut de me voir afin de recueillir quelques détails sur les derniers moments de Fanny. Il ne pensait pas que j’y eusse assisté : mais je pouvais savoir quelque circonstance qu’on l’avait forcé d’ignorer. Il n’eut osé questionner aucune autre personne, dans la crainte d’éveiller des soupçons sur la mémoire de cette malheureuse femme.

» Donc, aussitôt qu’il eut rendu les derniers devoirs à sa sœur, il partit pour Bordeaux, mais non sans faire un détour pour venir me voir. Le hasard voulut que Jeanne fût seule à la maison. Il fut si frappé de sa ressemblance avec Fanny, qu’un moment il crut la voir elle-même et balbutia des paroles éperdues. Jeanne l’aurait pris pour un fou, si elle n’eût été très-émue elle-même. Il y a longtemps que Jeanne avait surpris ou deviné le secret de sa naissance. Romanesque, elle a toujours attendu son père comme une sorte de génie bienfaisant, et toute figure nouvelle d’un certain âge l’a toujours plus ou moins troublée. J’arrivai à temps pour dissiper leur mutuel embarras. Je reconnus sir Richard tout de suite et fis signe à Jeanne de se retirer.

» Alors, me saisissant les mains, sir Richard s’écria :