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docteur, je suis de trop. Je ne m’en fâche pas. Je sais qu’en de certaines circonstances les meilleurs amis sont importuns. Oh ! mon Dieu ! je ne me fâche de rien. Je blâme la précipitation, l’absence de confiance, voilà tout ; mais, après le blâme, vient toujours le pardon, et c’est, sur quoi vous pouvez compter l’un et l’autre.

Ayant ainsi parlé avec une nuance d’ironie, il voulut encore nous quitter sans nous entendre.

Manuela se mit devant la porte.

— Vous ne vous en irez pas comme cela, lui dit-elle. Grondez-moi, je le mérite certainement, puisque vous voilà fâché ; j’accepte tous les reproches, mais je veux me justifier, tout au moins m’expliquer. Vous êtes fatigué, cher ami, vous allez vous reposer ici, on vous apportera votre thé, nous resterons à vous servir, et, après, nous causerons, nous vous dirons tout !

— Mais je sais tout, reprit M. Brudnel avec une bonhomie railleuse en se jetant sur un fauteuil. J’ai tout entendu : Dolorès m’a supplié de vous écouter afin de juger de la situation. Si je me suis mêlé à votre entretien, c’est parce que je voulais vous épargner une faute sérieuse, celle de vous lier irrévocablement l’un à l’autre sans vous souvenir de votre meilleur ami. Sonnez, ma chère enfant ; nous voici très-