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— Certainement, reprit la Dolorès, c’est un homme très-bon, et il a beaucoup de tendresse pour elle ; mais appelez-vous donc ces promenades-là le plaisir et le bienfait de la liberté ? Peut-on vivre éternellement tête à tête avec un homme qui n’a plus les besoins et les goûts de la jeunesse ? Jamais de conversations, jamais de visites, jamais de théâtre ni de bal. Voyons, monsieur le docteur, si vous aviez une femme, la tiendriez-vous à l’attache comme cela ?

— Si j’avais une maîtresse, peut-être ; une femme légitime, j’exigerais qu’elle ne s’occupât que de son ménage et de ses enfants. C’est vous dire que je ne prendrai jamais pour femme une personne qui aura besoin, pour se bien porter, de conversations, de visites, de théâtre et de bal.

— Eh bien, reprit Dolorès, vous seriez dans le vrai, parce que vous auriez un ménage et des enfants ; votre femme aurait de quoi s’occuper, et elle vous aurait, d’ailleurs ! Un homme jeune et beau, on n’est pas triste, on n’est pas malade quand on a une pareille compagnie, tandis que…

— Assez ! dit Manuela, qui était devenue rouge comme le feu et dont la voix tremblait. Tais-toi, Dolorès, tu ne dis que des sottises et des impertinences !