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Sans doute il est sans ressources et ne se soucie pas que lui. L’épreuve est faite, pourtant elle n’est pas décisive. Qui sait s’il ne se met pas en mesure de rapporter lui-même la réponse ? Donnons-lui un mois, deux, si vous voulez ; mais, après ce délai, il faudra avoir le courage de renoncer à lui sans faiblesse.

» Nous n’eûmes pas si longtemps à attendre. Deux jours plus tard, M. Brudnel recevait une lettre de cet officier, que je me rappelle mot pour mot :

« Monsieur, j’allais me rendre à Madrid avec l’intention de réparer le tort que j’ai pu faire à mademoiselle Manuela. Je croyais la trouver avec son père, j’apprends qu’il est parti et que vous le remplacez ; ceci est fort suspect à mes yeux, et, pour toute sorte de raisons qu’il vaut mieux ne pas écrire, mais que vous comprenez de reste, je me retire de ma poursuite et renonce au devoir que je comptais accomplir. »

» — Ceci, me dit M. Brudnel, est la défaite outrageante d’un homme qui veut mettre la honte de mon côté et du vôtre. Allons, ma pauvre enfant, êtes-vous guérie de cet amour si mal placé ?

» — Oh certes ! répondis-je, mais je ne guérirai jamais de la honte de ma folie !