Page:Sand - Ma Soeur Jeanne.djvu/126

Cette page n’a pas encore été corrigée

pouvante ou du désespoir ? Réponds-moi, je t’en prie. »

Je répondis sur l’heure :

« Oui, je serais un protecteur, un ami dévoué, un véritable frère. Sois libre, ma chérie, sois libre dans les émotions de ton cœur comme tu l’es dans les inspirations de ton art. Pense sans effroi à la résolution que tu prendras dans un an. Ta mère acceptera tout avec son inaltérable et inépuisable tendresse, avec son haut esprit de justice et de vérité. Mon ami Vianne saura se résigner sans rien perdre du respect qui te sera toujours dû. Quant à ton frère, il a consacré son avenir à un but, c’est de ne jamais coûter de larmes à sa mère et d’empêcher, autant qu’il est au pouvoir d’un homme, que sa sœur Jeanne en ait jamais une seule à verser. »

J’écrivis aussi à ma mère pour lui rapporter textuellement le court entretien que j’avais eu sur son compte avec M. Brudnel ; je portai mes lettres à la poste ; je dînai dehors, ne voulant pas me faire servir à la villa en l’absence du maître, et je rentrai au coucher du soleil.

Je me préparais à travailler et je songeais à ma sœur, à cet effroi du mariage qu’il ne fallait certes pas brusquer, aux idées singulières qu’elle avait eues