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c’étaient tantôt des éclats de rire avec la femme de chambre espagnole, tantôt un interminable babillage, ou des exclamations pour séparer le singe et les chiens qui se querellaient, puis des sons de guitare, des roulements de castagnettes, comme si l’on eût dansé, et par-dessus tout les cris aigus de la perruche, qui redoublaient quand on voulait lui apprendre à parler.

Il y avait un très-beau jardin où je compris qu’il ne fallait pas me promener parce qu’il était réservé pour madame. Sir Richard lui-même n’y pénétrait pas. Les pins parasols et les allées en voûte qui ombrageaient ce jardin le cachaient mystérieusement. Par quelques rares éclaircies, j’apercevais parfois la belle Héléna se faisant balancer dans un hamac par le petit nègre, ou jouant avec ses bêtes favorites. Si elle me voyait à ma fenêtre, elle me criait un bonjour amical. Vêtue d’une robe de chambre en cachemire blanc, chaussée de babouches écarlates, la taille entourée d’une écharpe de soie lamée d’or, les cheveux à peine relevés, tombant à tout instant en ondes lustrées sur ses épaules délicates, elle était vraiment charmante. Jamais je n’ai vu de femme plus gracieuse dans ses poses et dans ses moindres mouvements, et cela naturellement, sans paraître le savoir. Elle gagnait à être vue à quelque distance, car de près, elle était un peu flétrie malgré un