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les sept cordes de la lyre

n’écoutez pas mes leçons, je saurai vous démasquer et vous empêcher d’égarer le siècle.

LE PEINTRE. Une leçon, une petite leçon de peinture, je vous en prie. Tenez, voilà mon crayon. Faites une main, un pied, un nez, ce que vous voudrez, enfin.

LE POËTE. Improvisez une strophe, allons ! que nous voyions enfin ce que vous savez faire.

LE MAESTRO. Non, non, qu’il joue de la lyre, et, s’il la fait parler, rendons-lui hommage.

LE PEINTRE et LE POËTE. J’y consens, allons !

LE CRITIQUE, prenant la lyre. Et moi aussi, je consens à vous montrer que je sais mieux que vous les arts que vous professez. Je vais vous chanter, en vers alexandrins, une dissertation sur la peinture, et je m’accompagnerai de la lyre sur le mode ionique.

LE PEINTRE. Ce Sera superbe et vraiment neuf. Voyons !

LES DEUX AUTRES. Voyons, commencez !

MÉPHISTOPHÉLÈS, à part. Allons ! toi, tu es celui sur lequel j’ai le plus compté ! (Le critique pose les doigts sur la lyre, et les retire avec un cri douloureux.)

LES AUTRES. Qu’est-ce que c’est ? que vous arrive-t-il ?

MÉPHISTOPHÉLÈS, à part. Esprit de la lyre, tu triomphes !

LE CRITIQUE. Infâme ! vous ne m’aviez pas dit que ces cordes étaient tranchantes comme des lames de poignard. Je me suis coupé, jusqu’aux os. Ah ! mon sang coule par torrents, et une douleur cuisante se communique à tous mes membres. Je succombe. Secourez-moi !