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lettres à marcie

Quant à nous qui sommes les enfants du siècle, nous chercherons dans notre Éden ruiné quelques palmiers encore debout, pour nous agenouiller à l’ombre et demander à Dieu de rallumer la lampe de la foi. Nous tâcherons de sauver dans nos croyances passées quelques-unes de ces grandes sympathies poétiques, filles de l’enthousiasme, mères de la vérité. Là où notre conviction restera impuissante à percer le mystère de la lettre, nous nous rattacherons à l’esprit de l’Évangile, doctrine céleste de l’idéal, essence de la vie de l’âme. Avec cet aliment sain et robuste, cette morale toute tracée et si facile à ramener à son vrai sens, avec le charme de cette philosophie chrétienne qui se rattache à ce qu’il y a de plus beau et de plus pur dans les philosophies antérieures, avec la ferme volonté de tout sacrifier à l’amour et à la recherche de la vérité, je pense que nous pouvons atteindre à une sorte de calme ou du moins à un grand rassérénement de l’âme. Comment la pureté, ou tout au moins l’épuration de la conscience, ne conduirait-elle pas à la lucidité de l’esprit, à un meilleur équilibre du caractère ? Avant de nous formuler une doctrine, sans doute il nous faudrait atteindre naïvement et sincèrement le premier point. C’est peut-être tout ce que pourra faire cette génération, et c’est déjà beaucoup. L’existence d’un Dieu-Perfection nous est si intimement révélée, qu’elle ne peut être révoquée en doute dans l’état de santé morale. Pour guérir les athées, il ne faudrait peut-être qu’observer une hygiène intellectuelle, combattre l’orgueil, la sensualité, l’égoïsme, entrer de bonne foi dans une réforme douce et graduée, suivre, en un mot, ne fût-ce que comme essai, un régime d’esprit