Page:Sand - Les Sept Cordes de la lyre.djvu/145

Cette page a été validée par deux contributeurs.
135
les sept cordes de la lyre

Le premier bourgeois. Parbleu ! compère, l’archange de cuivre qui est là-haut, là-haut, et qui souffle dans sa trompette depuis le temps du roi Dagobert sans en faire sortir le plus petit bruit. Eh bien, tout à l’heure il a joué des airs charmants pendant plus de vingt minutes ; je l’ai entendu comme…

Le second bourgeois. Comme vous m’entendez causer quand je ne dis rien. À d’autres, maître Spiegendorf !

Le troisième bourgeois. Vous avez eu une lubie, ma bonne dame. Les oreilles vous ont tinté.

La dame. Monsieur, je ne suis pas faite pour en imposer.

Le second bourgeois. Si vous n’avez que cela à nous dire, c’était bien la peine que je me dérange de mon comptoir.

Le troisième bourgeois. Et moi donc ! qui voyais tous ces badauds rassemblés là sur le milieu de la place, regardant en l’air le bout de leur nez, qu’ils prenaient pour la flèche de la cathédrale. J’espérais… c’est-à-dire je croyais qu’il était tombé quelqu’un du haut des tours, et je venais voir bien vite.

Le second bourgeois. Ils auront entendu l’organiste de la cathédrale qui étudie l’air de Marie trempe ton pain, pour nous le jouer dimanche à la grand’messe.

Le premier bourgeois. Ah ! Au fait, c’était peut-être cela.

La dame. Je connais très-bien le son de l’orgue. D’ailleurs, l’église est fermée, on ne l’entendrait pas d’ici. Et puis l’ange n’a pas du tout joué des airs d’église ; c’est même singulier comme c’était peu religieux.