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les sept cordes de la lyre

sa fantaisie. En voulant la secourir, on ne peut que déterminer sa mort.

Hanz. N’ayez pas peur, maître, il y a en elle un esprit qui la possède. Elle agit par une impulsion surnaturelle. Laissez-la, ne lui dites rien. Je vais monter, sans qu’elle me voie, par l’escalier opposé. Je me cacherai derrière l’archange de bronze, et, si elle veut se précipiter, alors je me jetterai sur elle et la retiendrai de force. Ayez l’air de ne pas vous inquiéter d’elle. (Il passe derrière la flèche, et monte l’escalier opposé à celui qu’Hélène a franchi. Albertus et Wilhelm s’appuient contre la balustrade de la tour. Hélène, au haut de la flèche, s’assied sur la dernière marche, aux pieds de la statue de l’archange.)

Albertus. Quel effrayant spectacle ! Suspendue ainsi dans les airs, sans appui, sans balustrade, sur cette base étroite, pourra-t-elle résister au vertige ? Ô misérable que je suis ! C’est moi qui serai cause de sa mort !

Wilhelm. Maître, son délire même la rend inaccessible au vertige. Elle échappera au danger, parce qu’elle n’en a pas conscience. D’ailleurs, voyez ! Hanz est déjà auprès d’elle, derrière la statue. Hanz est vigoureux et intrépide ; il est calme dans les grandes occasions : il la préservera. Prenez courage, et surtout montrez-vous tranquille. (Hélène accorde la lyre.)

Albertus, à part. Si elle s’aperçoit de la soustraction des deux cordes, qui sait à quel acte de désespoir elle peut se porter ? Mais non !… elle ne s’en aperçoit pas… Elle rêve, elle s’inspire du spectacle déployé sous ses pieds !

L’esprit de la lyre. Ô fille des hommes ! vois ce spectacle éblouissant ! Écoute ces harmonies puissantes !