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suis donc point en peine, et me sens plus pressé de savoir la vérité sur Brulette ; car, enfin, encore que mon cœur l’ait défendue, mon raisonnement me dit qu’il faut qu’il y ait eu, en sa conduite, quelque petite chose qui prête au blâme, et j’en dois être juge avant que d’aller plus loin.

J’allais lui raconter ce qui s’était passé une heure auparavant, sous mes yeux, entre Huriel et ma tante, quand Huriel lui-même arriva vers nous, dépêché par Brulette, qui craignait la gêne occasionnée à Thérence pour le dormir de Charlot. Le père et le fils eurent alors une explication où Huriel, priant son père de ne point lui faire dire un secret où il avait engagé sa parole, et dont Brulette même ne le savait pas instruit, lui jura, sur son baptême, que Brulette était digne en tout d’être bénie par lui.

— Venez la voir, mon cher père, ajouta-t-il ; cela vous est bien commode, car, en ce moment, on danse dehors, et vous n’avez pas besoin d’être invité pour vous trouver là. À la manière dont elle vous embrassera, vous verrez bien que jamais fille plus aimable et plus mignonne ne fut plus saine de sa conscience.

— Je n’en doute plus, mon fils, et j’irai seulement pour te contenter, ainsi que pour le plaisir de la voir ; mais demeurons encore un peu, car je te veux parler de Joseph.

Je pensai devoir les laisser s’en expliquer ensemble, et aller avertir ma tante de l’arrivée du grand bûcheux, sachant bien qu’elle lui ferait bon accueil et ne le laisserait point dehors. Mais je ne trouvai au logis que Brulette toute seule. Toute la noce, avec la musique en tête, avait été porter la rôtie aux nouveaux mariés, lesquels s’étaient retirés en une maison voisine, car il était environ les onze heures du soir. C’est une ancienne coutume, que je n’ai jamais trouvée bien honnête, d’aller ainsi troubler, par une visite et des chansons de joyeuseté, la première honte d’une jeune mariée ;