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si bien que ce fut comme une rage à qui l’inviterait, et on se serait quasi battu pour lui donner le baiser de l’entrée en danse.

Les dames et demoiselles en bisquèrent, et les femmes de chez nous firent reproche à leurs paroissiens de ne savoir pas mieux garder leur rancune ; mais ce fut comme si elles chantaient complies, tant le regard d’une belle a plus de baume que la langue d’une laide n’a de venin.

— Eh bien, Brulette, lui dis-je en la ramenant chez nous, n’avais-je pas raison de te secouer un peu de tes ennuis ? Tu vois que la partie n’est jamais perdue, quand on sait la jouer franchement.

— Je t’en remercie, cousin, me dit-elle. Tu es le meilleur de mes amis, et mêmement, je pense, le seul fidèle et sûr que j’aie jamais eu. Je suis contente d’avoir eu raison de mes ennemis, et, à présent, ne m’ennuierai plus à la maison.

— Diantre ! tu vas vite ! Hier, c’était tout bouderie ; aujourd’hui, c’est tout liesse ! Tu vas donc reprendre ton rang de reine du bourg ?

— Non, dit-elle ; tu ne m’entends pas. Voici la dernière fête où j’irai, tant que j’aurai Charlot ; car, si tu veux que je te le dise, je ne me suis pas diverti une miette. J’ai fait bon visage pour te contenter, et je suis aise, à présent, d’avoir soutenu l’épreuve ; mais, tout le temps que j’ai été là, je n’ai pensé qu’à mon pauvre gars. Je le voyais toujours pleurant et rechignant, quelque amitié qu’on pût lui faire chez toi, et il est si maladroit à se faire comprendre, qu’il se sera ennuyé en ennuyant les autres.

Ces paroles de Brulette me retournèrent le sang. J’avais oublié Charlot en la voyant rire et danser. L’amour dont elle ne se cachait plus pour lui me remit en tête tout ce qui me semblait ses mensonges passés ; et je crus aussi pouvoir la regarder comme une affineuse sans pareille, qui se lassait de se contraindre.