Page:Sand - Les Deux Freres.djvu/66

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

écoute, et ne t’afflige plus, nos affaires vont bien, ma Charlotte ! nous voilà sauvés.

— Ah ! mon Dieu, quoi donc ?

— Tu sais que, tous les ans, je reçois, je ne sais d’où et de qui, mais de mon père assurément, de l’argent pour payer ma pension à ton père. Tu sais aussi qu’il y a eu dans une lettre, au commencement, une promesse de vingt mille francs pour m’établir à vingt et un ans. Je ne recevais plus rien, ton père croyait qu’on m’avait abandonné ou que mes parents étaient morts sans pouvoir rien faire de plus pour moi. Eh bien, j’ai reçu aujourd’hui du facteur un gros paquet où il y a le double de ce qu’on m’avait promis. Je suis donc riche, très-riche, et ton père dira oui.

— Oh ! bien sûr ! Quel bonheur, mon Dieu ! Mais viens donc lui dire cela, il n’est pas couché ; d’ailleurs, il se réveillera avec plaisir.

— Attends ! Dis-moi d’abord que tu es contente et que tu ne mépriseras pas le pauvre nom d’Espérance.

— Ah ! peux-tu le croire ? moi qui t’ai aimé toute ma vie !

— C’est vrai, toute ta vie ! C’est comme moi. S’aimer toute la vie, mon Dieu, que c’est bon et que c’est beau de pouvoir s’aimer comme cela !

— Mais viens donc ! pourquoi n’es-tu pas venu tout de suite ? Qu’est-ce que tu faisais tout à l’heure dans la chapelle ?