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dame de Montesparre. Dois-je aller le lui dire ?

— Non, elle serait humiliée peut-être, inquiète tout au moins, de devoir son bonheur à mon influence. Dites-lui seulement que je vous ai démontré les impossibilités d’un mariage entre nous, et montrez-vous calme et satisfait comme doit l’être un homme de bien et un philosophe aussi sérieux que vous l’êtes. Dans quelques jours, quand je serai partie avec Roger…

— Dans quelques jours ?

— Oui, j’ai reçu tantôt une lettre de mon notaire. Il faut que je m’occupe des affaires de la succession. M. de Flamarande a fait un don considérable à sa maîtresse, et nous accepterons cette spoliation en silence ; mais la fortune est très-entamée, et il faut aviser à la liquider. Donc, je pars avec Roger afin d’agir en son nom, si Gaston persiste à ne pas hériter.

— Il persistera, mais ne vous en affectez pas ; mon mariage avec Berthe facilitera les moyens de vous rapprocher plus souvent et plus longtemps de lui. Quant à son sort, ne vous en inquiétez pas non plus. Gaston ne peut être heureux qu’à la condition de suivre les inspirations de son cœur ardent et de son imagination exaltée. Dieu merci, ces inspirations sont toujours empreintes d’un héroïsme si entier qu’il a les apparences du calme et de la gaieté. Le fond de sa résolution, c’est qu’il aime Charlotte et ne veut pas la voir se transformer en femme du