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rons et nous le ramènerons. Si ta mère me demande avant que je sois rentré, dis-lui que tu m’as rencontré en promenade botanique, et que tu ne sais pas quand je rentrerai.

Gaston ne fit pas d’objection. Il remonta à cheval et repartit, emmenant l’autre bête. Je suivis M. de Salcède, qui s’arrêta à la Violette et m’invita à déjeuner avec lui à la hâte. Nous ne nous étions couchés ni l’un ni l’autre, nous devions reprendre des forces. Une heure après, nous arrivions à Léville. Roger n’y était pas, il n’y avait point paru.

M. de Salcède, voyant l’inquiétude qui s’était emparée de moi, renferma la sienne. J’étais tombé dans une morne tristesse. Le chagrin de Roger, les résolutions désespérées qu’il pouvait prendre, les nouvelles douleurs qui frapperaient sa mère, tout cela était mon ouvrage. Et pourtant M. de Salcède ne me le faisait pas sentir. Il acceptait mon triste passé et me poussait à l’action comme si j’eusse été pour lui le bon champion d’une bonne cause.

— Allons, courage, me dit-il. Pour retrouver ceux qu’on veut joindre, il faut les chercher. Il n’y a que deux voies pour sortir d’ici sans reprendre celle que nous venons de suivre : l’une qui retourne à Flamarande en passant par Montesparre, et c’est probablement celle qu’il aura prise. Qui sait s’il n’aura pas voulu consulter la baronne ? Vous sentez-vous la force d’aller jusque-là ?