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que dans les livres. Notre consolation sera de nous aimer, de nous estimer l’un l’autre et d’adoucir autant que possible à notre mère les chagrins qui l’attendent.

» — Et pour commencer, lui dis-je, tu la quittes dans un moment pareil ! Tu te flattes qu’elle ne devinera pas ce que signifie ton départ subit et farouche ? Elle a beaucoup souffert pour moi, mais elle n’a eu de toi que joie et consolation. Oh ! je t’en supplie, qu’elle ne souffre jamais par toi, qu’elle n’ait jamais à souffrir pour nous deux !

» Il était attendri.

» — Eh bien, répondit-il, je te promets de ne pas partir ainsi. Vrai, j’ai besoin de me raisonner encore, je suis faible, moi, je ne suis pas un stoïque comme toi, je ne prends pas mon parti en un moment. Que veux-tu ! je n’ai jamais souffert, ma mère m’a toujours caché ses larmes, je n’ai jamais appris le courage ; mais je l’adore, ma pauvre mère, et je m’arrangerai pour ne pas l’inquiéter. Je vais continuer ma promenade jusqu’à Léville. Dis-lui que j’avais quitté ces braves personnes trop brusquement, que j’ai senti mon tort et que je vais réparer mon impolitesse. Ce soir, je serai à Flamarande, j’exige que tu ne lui parles pas de ce qui s’est passé entre nous. Je ne veux pas lui en parler, moi, je n’en aurais pas le courage, je veux avoir l’air d’ignorer tout. Je lui dirai que je m’ennuie en Auvergne, et que, ne pouvant reparaî-