Page:Sand - Les Deux Freres.djvu/182

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ma seule superstition. Le lâche qui me l’a enlevé peut se dire qu’il a entre les mains le signe et la consécration de vingt années de force morale et de dévouement absolu !

Puis, levant les yeux sur moi :

— C’est vous qui avez fait ce larcin d’une habileté surprenante ?

Son regard était si terrible que je sentis la témérité de ma conduite. L’original était sur moi, Salcède était un hercule, il pouvait me forcer à le lui rendre.

Il devina mon anxiété.

— Soyez tranquille, me dit-il, je n’userai pas de violence avec vous : je vous rachèterai mon talisman au prix que vous voudrez, car j’y tiens comme à ma vie ; mais je vous le laisserai tant qu’il pourra servir, car il est le complément des preuves d’innocence que j’ai là dans ce bureau. Sachez, monsieur, que je vous méprise profondément, et que, s’il s’agissait de moi seul, je vous chasserais de chez moi sans vous répondre ; mais ici il s’agit de l’honneur d’une femme pure et de l’avenir de ses deux fils, également légitimes. Vous allez donc prendre la peine de voir toutes les lettres de madame de Flamarande à madame de Montesparre, afin de vous convaincre que vous n’avez aucune preuve contre madame la comtesse, et que vos tentatives pour la flétrir tourneraient à votre confusion. Lisez !