Page:Sand - Les Deux Freres.djvu/17

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Gaston à la dérobée. Ah ! si j’avais à présent le cher exilé près de moi ; je me sens mourir d’être seule !

Je crus que c’était une prière de l’aller chercher.

— Ici ? m’écriai-je, c’est impossible !

— Je le sais bien, répondit-elle, et je n’ai jamais songé à l’y faire venir. M. de Flamarande veut qu’il soit à Flamarande. Il y est et y restera tant qu’il consentira à y rester, car le voilà en âge d’être libre, et il est possible qu’il veuille changer de résidence et de situation. Jusqu’à présent je me suis flattée que mon mari me le ramènerait quand il aurait vingt et un ans, et c’est pour cela que je tenais à le laisser à Flamarande, dans la position apparente où on l’avait mis. On le voulait paysan, il est paysan ; courageux, fort et patient, il est tout cela. Il a donc été religieusement tenu dans les conditions exigées, et on n’aurait pas de prétexte pour le repousser ; mais il a vingt et un ans, et on ne le rappelle pas, on ne veut pas le rappeler ! N’est-ce pas, Charles, on prétend l’ensevelir et le renier à tout jamais ? Dites-moi la vérité. J’ai nourri de longues illusions, mais je vois que mes amis avaient raison de ne pas les encourager, et à présent je veux connaître mon sort. Dites-le-moi, vous savez que je n’abuse pas des questions.

— Puisque madame la comtesse l’exige, et qu’elle a le droit de savoir la vérité, je la lui dirai. Il est