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de trois jours il n’y songeait plus ; la prédiction de Salcède se réalisait. Il ne s’amusait pas beaucoup à Montesparre ; il ne songeait qu’à revoir Paris. Sa mère lui fit comprendre qu’au lendemain de la mort de son père il ne devait pas reparaître dans le monde avec le visage fleuri et le cœur léger qu’il ne pouvait se défendre d’avoir. Elle l’engageait à laisser passer quelques semaines sur l’événement et à se distraire du mieux qu’il pourrait en Auvergne. Il parut se rendre à son avis et accepta l’invitation que lui firent les jeunes Léville d’aller chasser avec eux sur leurs terres.

Ces Léville, anciens amis des Montesparre, avaient leur château au pied de la montagne. C’est eux que nous avions rencontrés auprès de la Violette le jour funeste où, notre voiture de voyage s’étant brisée à l’entrée des gorges de la Jordanne, ils nous avaient ramenés dans leur calèche à Montesparre. Sans cette rencontre, nous allions coucher à Flamarande, et le terrible événement de la nuit du 15 août 1840 n’eût point eu lieu.

Comme Roger parlait de rester au moins trois jours absent et qu’il ne montrait plus avoir aucun souvenir de Flamarande, madame crut qu’elle pouvait profiter de son absence pour y faire une excursion. Madame de Montesparre l’y engageait et lui offrait son cheval de selle qui l’y porterait en deux heures par la traverse. Elle aussi avait fait bien des voyages mystérieux pour voir Salcède et son