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qu’un péché d’habitude ; mais je me suis laissé aller à l’humeur contredisante avec M. de Villareal, et cela est contre toute hospitalité et toute bienséance. Faites notre paix, ma chère fille, et dites-lui, vous qui me connaissez, que je suis un vieux huguenot têtu et batailleur, mais franc comme l’or et tout à son service quand même.

M. de Beuvre se vantait. Il n’était pas un huguenot bien féroce, et les idées religieuses couraient fort embrouillées dans sa cervelle. Mais il avait des haines et des rancunes politiques assez vives, et il ne pouvait entendre parler de certains adversaires sans donner carrière à sa brusque franchise.

Or, M. d’Alvimar l’avait blessé en prenant la défense de l’ex-gouverneur du Berry, M. le duc de la Châtre, sur le compte duquel le hasard de la conversation les avait mis.

Lauriane, informée du sujet de la discussion, prononça doucement son verdict.

— Je vous absous tous deux, dit-elle : vous, monsieur mon père, pour avoir pensé qu’en aucune chose de ce monde, sauf la bravoure et l’esprit, l’exemple de feu M. de la Châtre n’était bon à suivre ; — vous, monsieur de Villareal, pour avoir plaidé la cause d’un homme qui n’est plus là pour se défendre.

— Bien jugé ! s’écria Bois-Doré, et parlons d’autre chose.

— Oui, certes, ne parlons plus de ce tyran ! riposta le vieux gentilhomme, ne parlons plus de ce fanatique !

— Il vous plaît de le traiter de fanatique, reprit d’Alvimar, qui ne savait pas céder ; quant à moi, qui l’ai beaucoup connu à la cour, si j’eusse osé lui adresser un reproche,