Page:Sand - Les Beaux Messieurs de Bois-Dore vol1.djvu/333

Cette page n’a pas encore été corrigée

sans se trop vieillir, la regarder comme la sœur aînée de Mario.

D’ailleurs sa bizarre coquetterie arriva à s’accommoder de deux enfants encore mieux que d’un seul. Ces jeunes compagnons, dont il aimait à porter les couleurs tendres et à partager les amusements naïfs, le rajeunirent dans son estime, au point qu’il se persuadait parfois être lui-même un adolescent.

— Tu vois, disait-il à Adamas, il y a des gens qui vieillissent ; moi, je ne saurais leur ressembler, puisque je ne me plais qu’avec la jeunesse innocente. Je te jure, mon ami, que je suis revenu à mon âge d’or, et que j’ai les idées aussi pures et aussi riantes que cette mignonne et ce chérubin.

Lauriane, Mario et le marquis devinrent donc inséparables, et leur vie s’écoulait dans une continuité d’amusements entremêlés de bonnes études et de bonnes actions.

Lauriane n’avait pas été élevée du tout. Elle ne savait rien. Elle voulut assister aux leçons que Jovelin donnait à Mario dans le grand salon. Elle écoutait, en brodant un siége de tapisserie aux armes du marquis, et, quand Mario avait lu ou récité sa leçon, il mettait sur ses genoux les démonstrations écrites de Lucilio pour les lire avec elle. Lauriane s’étonnait de comprendre aisément des choses qu’elle avait cru être au-dessus de l’intelligence d’une femme.

Elle se plaisait beaucoup à la leçon de musique et faisait quelquefois sa partie de téorbe avec agrément, tandis que la Morisque chantait ses douces complaintes.

Le marquis, étendu sur sa grande chaise, regardait, pendant ces petits concerts, les personnages de la tapisserie d’Astrée, et croyant les voir agir ou les entendre