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n’ait été en sa possession, il y a dix ans, et qu’il les ait reçues depuis en don ou en héritage. Il serait alors le parent ou l’ami de l’assassin ; il se trouve des scélérats et des lâches dans les meilleures familles. Comme vous, maître Jovelin, j’ai mauvaise opinion de notre hôte ; mais je suis certain que, comme moi, vous hésitez encore beaucoup à le condamner sur ces preuves.

Lucilio fit signe que oui, et conseilla au marquis de tâcher de lui faire avouer la vérité par surprise ou par ruse.

— C’est à quoi nous songerons avec soin, répondit Bois-Doré, et vous m’y aiderez, mon grand ami. Pour le moment, il nous faut aller souper, et, puisque nous sommes seuls entre nous, nous allons nous donner la joie de manger avec notre petit futur marquis, dont la place, pas plus que la vôtre, n’est à l’office.

— Et pourtant, monsieur, si vous m’en croyez, dit Adamas, nous laisserons encore aujourd’hui les choses comme elles sont. La Bellinde est une méchante peste et je la trouve beaucoup trop amie avec le presbytère officine de mauvais propos contre nous tous.

— Voyons, Adamas, dit le marquis, qu’y a-t-il donc de si piquant entre le presbytère et toi ?

— Il y a, monsieur, que, moi aussi, j’ai consulté la magie. Ce matin, à peine fûtes-vous parti, qu’un nommé La Flèche, le même bohémien, sans doute, que vous avez vu, sur le jour, à la Motte, vint rôder autour du château et offrir de me dire la bonne aventure. Je refusai ; j’ai trop grand’peur des prédictions, et je dis que le mal qui nous doit arriver nous arrive deux fois quand nous le connaissons d’avance. Je me contentai de lui demander qui m’avait dérobé la clef de l’armoire aux liqueurs, et il me répondit sans hésiter :