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j’irai lui faire visite. Après quoi, nous instruirons son procès entre nous.

— Vous n’irez pas seul, monsieur, dit Adamas. Qui sait si cette maladie n’est pas feinte, et si, averti par sa conscience, ce coquin ne vous tend pas quelque piége ?

— Tu déraisonnes, mon cher Adamas. S’il a tué mon pauvre frère, assurément il n’a jamais su son nom, puisqu’il est chez moi sans inquiétude.

— Mais voyez donc le poignard, mon cher maître ! Vous n’avez pas encore regardé cette preuve…

-Hélas ! dit Bois-Doré, penses-tu que je puisse l’examiner froidement ?

Lucilio conseilla au marquis de voir son hôte avant d’avoir rien éclairci, afin d’être assez calme pour lui cacher ses soupçons.

Adamas laissa passer le marquis ; mais il se glissa sur ses talons jusqu’à la porte de l’appartement de l’Espagnol.

D’Alvimar était effectivement malade. Il était sujet à des migraines nerveuses très-violentes, que ramenait tout accès de colère, et il en avait eu plus d’un dans la journée.

Il remercia le marquis de sa sollicitude et le supplia de ne pas s’occuper de lui. Il ne lui fallait que de la diète, du silence et du repos jusqu’au lendemain.

Bois-Doré se retira en recommandant à la Bellinde de veiller discrètement à ce que son hôte ne manquât de rien, et il prit occasion de cette visite pour examiner la figure du vieux Sanche, à laquelle il n’avait pas encore fait attention.

Long, maigre et blême, mais osseux et robuste, l’ancien éleveur de porcs était assis dans la profonde embrasure de la fenêtre, lisant, aux dernières lueurs du jour,