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— Je le dirai à monsieur ; je n’ai rien de caché pour lui, mais que monsieur daigne donc me raconter comment il s’y est pris pour faire connaître ses sentiments à l’incomparable dame de ses pensées, et comment elle a répondu ; car je suis sûr que rien d’aussi éloquent ne s’est dit sous le ciel depuis que le monde est monde, et je voudrais savoir écrire aussi vite que maître Jovelin, pour le coucher sur le papier à mesure que monsieur me le rapportera.

— Non, Adamas, aucune parole ne sortira de ma bouche, scellée par un serment de preux chevalier. J’ai juré de ne point trahir le secret de ma félicité. Tout ce que je peux te dire, mon ami, c’est de te réjouir du présent avec ton maître, et d’espérer avec lui en l’avenir !

— Alors, monsieur, c’est conclu, et… ?

Adamas fut interrompu par un petit grattement de chat à la porte.

— Ah ! fit-il après avoir été regarder, c’est l’enfant qui voudrait vous offrir le bonsoir. — Va-t’en, mon petit ami ; monseigneur te verra plus tard, il est occupé.

— Oui, oui, Adamas, qu’il revienne ! Il est bien question d’enfant ! Je ne sais quelles idées de paternité m’avaient passé hier par la tête ! Cela est du dernier bourgeois ! Non ! non ! je ne suis plus ce vieux garçon qui voulait se marier bien vite, pour faire une fin. Je suis un jeune homme, Adamas, oui, un jeune amoureux, un blondin, sur ma parole, tendrement condamné à prouver sa constance par des épreuves, à soupirer et à faire des vers, en un mot, à attendre, dans les tourments et les délices de l’espoir, le bon plaisir de ma souveraine.

— Si je comprends bien, reprit Adamas, cette divinité jalouse se méfie un peu de l’humeur volage de mon