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hérissés de plumes de coq, chapeaux sans nom, sans forme, sans raison d’être ; ruines arrogantes et désespérées, dont Callot a immortalisé la splendide invraisemblance dans ses grotesques Italiens.

De courtes bottes dentelées, l’une beaucoup trop grande, l’autre beaucoup trop petite pour son pied, laissaient voir des chausses d’un rouge tourné à la lie de vin. Un énorme scapulaire couvrait cette poitrine de mécréant, écriteau de sauvegarde contre l’accusation, toujours suspendue sur sa tête, de paganisme et de magie noire. Une chevelure d’une longueur insensée et d’un blond fade tombait plate sur sa face maigre, enluminée d’ocre rouge, et une moustache naissante allait rejoindre deux crocs de poil follet blanchâtre, plantés sous le menton lisse et luisant.

Il commença d’une voix de trompette fêlée :

— Que l’illustrissime compagnie daigne excuser l’hardiesse dont je m’ose précipiter aux genoux de son indulgence. En effet, convient-il à un bélître de mon acabit, avec sa physionomie hérissée, les cicatrices de son pourpoint et son chapeau qui postule depuis longtemps pour servir d’épouvantail de chènevière, de comparoir devant une dame dont les yeux font honte à la lumière du soleil, pour venir débiter ici une multiplicité de sottises ? Elle me dira peut-être, pour me remettre le cœur au ventre que je ne suis point un bâtier de paysan, ni un méchant batteur d’estrade, ni un valet grenier à coups de bâton, car il est dit des valets qu’ils sont comme les noyers, lesquels tant plus ils sont battus, tant plus ils rapportent. Elle me dira encore que je ne suis ni un escogriffe, ni un tire-laine, ni un damoiseau, ni un fier-à-bras, ni un olibrius, ni un godelureau, ni un pourfendeur, ni un ostrogoth, ni un escargot ; que j’ai assez