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cela chèrement, et en faire un trophée d’honneur dans quelque salle du château.

— Non, Adamas, on se moquerait de nous. Et, puisque voici venir ce bel enfant, il lui faut donner le chien d’étoupe et le reste ; car ce qui vient d’un ange doit retourner à un autre ange, et je vois dans les yeux de ce Mario l’innocence et l’amitié qu’il y avait dans ceux de mon jeune frère… Oui, c’est chose certaine ! continua le marquis en regardant entrer Mario et Mercédès, conduits par le page Clindor ; si Florimond eût eu un fils, il eût été en tout semblable à ce garçonnet, et, si tu veux que je te dise pourquoi il m’a plu à première vue, c’est parce qu’il me remet en mémoire, non point tant par ses traits que par son air, sa voix douce et ses manières caressantes, mon frère tel qu’il était vers l’âge où voici cet orphelin.

— Monsieur votre frère ne s’est jamais marié, dit Adamas, qui avait l’esprit encore plus romanesque que son maître ; mais il peut bien avoir eu des bâtards, et qui sait si… ?

— Non, non, mon ami, ne rêvons point ! J’ai bien eu une autre songerie, tandis que cette Morisque nous racontait l’histoire du gentilhomme assassiné ! Ne me suis-je point imaginé que ce pouvait être mon pauvre frère ?

— Eh bien, au fait, monsieur, pourquoi ne le serait-ce point, puisque nul ne sait comment il a péri ?

— Ce ne l’est point, répondit le marquis, et la raison, c’est que le père de ce petit Mario a été défait quatre jours avant la mort de notre bon roi Henri, tandis que j’ai une dernière lettre de mon frère, datée de Gênes, le seizième jour de juin, c’est-à-dire environ un mois après que ces choses se furent passées. Donc, il n’y a point de rapprochement à faire.