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résolu à tout souffrir, à se laisser humilier mille fois plutôt que de faire mauvais ménage avec son père. Il le connaissait trop bien pour ne pas avoir prévu qu’il ne fallait pas essayer de le primer. Content d’avoir acquis les talents qu’il avait ambitionnés, il attendait que l’occasion de les faire apprécier vînt d’elle-même, et il savait bien qu’elle ne tarderait pas. En effet, elle se présenta le jour où l’économe conduisit les deux menuisiers au château pour examiner les travaux en question.

CHAPITRE III.

Ils furent introduits dans un antique vaisseau qui avait servi successivement de chapelle, de bibliothèque, de salle de spectacle et d’écurie, suivant les vicissitudes de la noblesse ou les goûts des divers possesseurs du château. Cette salle était située dans un corps de bâtiment plus ancien que les autres constructions qui composaient le vaste et imposant manoir de Villepreux. Elle était d’un beau style gothique flamboyant, et les arceaux de la charpente annonçaient qu’elle avait été consacrée au culte religieux. Mais en changeant son usage à diverses époques, on avait changé ses ornements, et les dernières traces de réparation qui subsistaient, c’étaient les boiseries du quinzième siècle, qu’au dix-huitième on avait couvertes de planches et de toiles peintes pour jouer des pastorales, l’opéra du Huron, et la Mélanie de M. de La Harpe. Un reste de ce décor, barbouillé de guirlandes fanées et d’Amours éraillés, avait été enlevé ; et une certaine pièce située dans une tourelle adjacente avait pu ouvrir une porte, longtemps murée, sur la grande salle déblayée de ses oripeaux. Or, la tourelle était un lieu favori pour une certaine personne de la famille. Dès qu’on eut découvert