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pour moi, pourtant, les gens d’ici ; et, sans la crainte des gendarmes, ils me donneraient asile ! »

En rêvant ainsi Jean entendit la cloche qui sonnait l’angelus du soir, et des larmes involontaires coulèrent sur ses joues basanées, « Non, pensa-t-il, il n’y a pas à dix lieues à la ronde une seule cloche qui ait une aussi jolie sonnerie que celle de Gargilesse ! » Un merle chanta auprès de lui dans l’aubépine du buisson. « Tu es bien heureux, toi, lui dit-il, parlant tout haut dans sa rêverie, tu peux nicher là, voler dans tous ces jardins que je connais si bien, et te nourrir des fruits de tout le monde, sans qu’on te dresse procès-verbal.

— Procès-verbal, c’est ça, dit une voix derrière lui, je vous arrête au nom de la loi ! »

Et Caillaud lui mit la main au collet.


VII.

L’ARRESTATION.


« Toi ? toi ! Caillaud ! dit le charpentier stupéfait, avec le même accent que dut avoir César en se sentant frappé par Brutus.

— Oui, moi-même, garde champêtre. Au nom de la loi ! cria Caillaud de toutes ses forces pour être entendu aux environs, s’il se trouvait là quelque témoin ; et il ajouta tout bas : — Échappez-vous, père Jean. Allons, repoussez-moi, et jouez des jambes.

— Que je fasse de la résistance pour mieux embrouiller mes affaires ? Non, Caillaud, ça serait pire pour moi. Mais comment as-tu pu te décider à faire l’office de gendarme, pour arrêter l’ami de ta famille, ton parrain, malheureux ?

— Aussi, je ne vous arrête pas, mon parrain, dit