celui de vous demander d’être parfait, et ce serait votre faute.
— Comment cela ? dit le marquis en tortillant sa branche de chèvrefeuille avec une agitation qui semblait ne pas dépasser le bout de ses doigts.
— On est exigeant envers ceux qu’on estime, je dirais presque envers ceux qu’on admire, si je ne craignais d’offenser votre modestie.
— Vous vous en allez donc ? dit le marquis après un moment de silence problématique et avec un ton plus problématique encore.
— Oui, monsieur le marquis, je vous présente mon respect.
— Pourquoi ne dîneriez-vous pas avec moi ?
— Cela m’est impossible, répondit Émile, étourdi et effrayé d’une semblable proposition.
— Vous vous ennuieriez trop ! reprit le marquis avec un soupir qui, cette fois, trouva, je ne sais comment, le chemin du cœur d’Émile.
— Monsieur, répondit-il avec une effusion spontanée, je reviendrai dîner avec vous quand vous voudrez.
— Demain ! dit M. de Boisguilbault d’un ton accablé, qui semblait vouloir démentir l’empressement de son offre.
— Demain, soit, répondit le jeune homme.
— Oh ! non ! pas demain, reprit le marquis ; c’est lundi, c’est un mauvais jour pour moi ; mais mardi. Est-ce convenu ? »
Émile accepta avec beaucoup de grâce, mais, au fond de l’âme, il était déjà consterné à l’idée d’un tête-à-tête de quelques heures avec ce mort, et il se repentait d’un élan de compassion auquel il n’avait pas su résister.
M. de Boisguilbault, néanmoins, paraissait sortir de sa peur ; il voulut reconduire son hôte jusqu’à la grille où il