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campagne, qui sont ici, je m’en suis aperçu, encore plus invétérées qu’ailleurs, et je tenais à ce qu’étant élevé dans les vraies conditions du développement rustique, ce pauvre enfant n’eût point à souffrir de l’excès de ces conditions, cet excès ayant précisément pour résultat l’étiolement.

Mes hôtes, car c’est de chez eux que je t’écris, sont fermiers et gardiens de l’enclos où, sur la plate-forme d’un rocher, s’élève une des plus rudes forteresses du moyen âge, le berceau de cette famille dont les derniers représentants ont joué un rôle si malheureux dans les récentes vicissitudes de notre monarchie. Leurs ancêtres en ont joué un non moins fâcheux dans cette province et non moins important aux époques où la féodalité faisait la part des rois très-mince. Il n’est pas sans intérêt pour le travail historique dont je m’occupe de recueillir ici des traditions et d’étudier la physionomie du manoir et de la contrée : je n’ai donc pas menti absolument à ma mère en lui disant que j’allais voyager pour mon instruction.

Il y a en effet beaucoup à apprendre au cœur même de cette belle France, qu’il n’est pas de mode de visiter, et qui par conséquent cache encore ses sanctuaires de poésie et ses mines de science dans des recoins inabordables. C’est ici un pays sans chemins et sans guides, sans aucune facilité de locomotion, et où il faut conquérir toutes ses découvertes au prix du danger ou de la fatigue. Les gens qui l’habitent ne le connaissent pas plus que les étrangers. La vie pure-