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n’est plus inégal que ses relations avec sa mère. Il y a des semaines, des mois même, où il vient la voir presque tous les jours ; puis il disparaît, on n’entend plus parler de lui pendant des mois ou des semaines et quand il reparaît, il n’y a pas plus d’explication de part et d’autre que si l’on s’était quitté la veille. Je ne sais pas encore comment la marquise prend tout cela. Je lui ai entendu nommer quelquefois son fils aîné avec autant de calme et de déférence que s’il s’agissait du marquis, et tu penses bien que je ne me suis pas permis la moindre question sur un sujet aussi délicat. Elle avait seulement dit une fois devant moi, mais sans faire aucune réflexion, ce que je viens de te dire sur l’irrégularité capricieuse de ses visites.

Je m’attendais bien à le voir tomber des nues un jour ou l’autre, mais je ne pensais pas du tout à lui, lorsque, entrant dans le salon après le dîner pour regarder, selon ma coutume, si tout était arrangé au gré de la marquise, je ne fis aucune attention à un personnage qui y était installé dans un coin, enfoncé dans une causeuse. Quand la marquise a dîné, elle retourne à sa chambre, où ses femmes lui mettent un peu de blanc et de rouge, et elle y reste un quart d’heure, pendant que je fais la revue des lampes et des jardinières du salon. J’étais donc livrée à cette grave occupation, et, profitant de l’occasion de me mouvoir, j’allais et venais très-vite, en chantonnant une chanson de chez nous, lorsque je me