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main et l’encrier, et cet objet insignifiant portait en lui tout un monde de souvenirs. C’était un grain de jayet taillé et percé d’une certaine façon inusitée. Cela faisait partie d’un bracelet sans valeur que portait Caroline à Séval, et qu’il connaissait bien, parce qu’elle avait l’habitude de l’ôter pour écrire, et que lui-même, tout en causant, avait coutume de jouer avec ce bracelet. Il l’avait touché cent fois, et un jour elle lui avait dit : — Ne le cassez pas, c’est tout ce qui me reste de l’écrin de ma mère ! — Il l’avait regardé avec respect et retenu dans ses mains avec amour. Au moment de quitter sa petite chambre de Lantriac, Caroline, dans sa précipitation, avait brisé ce bracelet ; elle en avait ramassé vite toutes les perles, une seule était restée.

Cette perle noire bouleversa toutes les idées du marquis ; mais quelle rêverie était-ce là ? Ces jayets taillés pouvaient être une industrie du pays. Cependant il resta immobile et plongé dans des réflexions nouvelles. Il respira et interrogea le vague parfum de la chambre. Il regarda partout sans bouger. Il n’y avait rien sur les murs, rien sur la table, rien sur la cheminée. Enfin il avisa dans le foyer des parcelles de papier qui n’avaient pas entièrement brulé. Il se courba auprès des cendres, chercha minutieusement, et trouva un fragment d’adresse où ne restaient que deux syllabes : l’une, écrite à la main, c’était la dernière du mot de Lantriac ; l’autre, am, faisant partie du timbre de la poste. Le timbre, c’était celui d’Étam-