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des frissons. Elle n’osait bouger. Il lui semblait que M. de Villemer reconnaîtrait son pas à travers le plancher. Quant à lui, espérant trouver sous une autre forme le moyen de s’acquitter, il essaya et feignit de manger un peu, après quoi il demanda s’il pourrait trouver un cheval de louage pour s’en retourner. La nuit était noire et la pluie recommençait. Peyraque se chargea de le reconduire et sortit pour apprêter sa carriole ; mais auparavant il monta doucement chez Caroline. — Ce pauvre monsieur me fait peine, lui dit-il à voix basse. Il est bien malade, je vous en réponds ! On voit la sueur perler sur son front, et cependant il se fourre dans le feu comme un homme qui a la fièvre. Il n’a pas pu avaler deux bouchées, et quand il respire, on dirait que ça lui déchire le cœur, car il y met sa main, tout en souriant d’un bon courage, mais en la reportant à son front, comme quand on souffre beaucoup.

— Mon Dieu ! dit Caroline effrayée, quand il est malade, c’est si grave !… Il ne faut pas le reconduire ce soir, ta carriole n’est pas douce, et les chemins d’ailleurs !… puis le froid, la pluie, avec la fièvre ! Non, non, il faut qu’il passe la nuit ici… Mais où ? Il aimerait mieux coucher dehors qu’à l’auberge, qui est si malpropre ! Il n’y a qu’un moyen ! Garde-le, retiens-le. Donne-lui ma chambre. Je vais rassembler mes effets, ce ne sera pas long, et j’irai chez ta belle-fille.

— Chez ma bru ou dans le village, c’est trop près ;