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ment trop vite, et je me demande comment nous allons faire pour nous quitter.

« En outre, quoique ma Justine et mon Peyraque me manquent, je me plais beaucoup dans ces ruines grandioses, d’où l’on embrasse un des plus beaux sites de la terre, et d’où l’on plonge sur les abîmes, au-dessus de toute habitation. L’air est si pur que les pierres blanches mêlées aux débris de moellon de lave sont blanches comme au sortir de la carrière. Et puis l’intérieur de ce manoir immense est rempli de choses très-curieuses.

« Il faut que tu saches que les Polignac ont la prétention de descendre d’Apollon ou de ses prêtres en droite ligne, et que la tradition consacre ici l’existence d’un temple de ce dieu, temple dont quelques débris subsisteraient encore. Moi, je crois qu’il n’y a pas à en douter et qu’il suffit de les voir. La question est de décider si les inscriptions et les sculptures ont été apportées pour décorer le manoir selon l’usage de la renaissance, ou si le manoir a été construit sur ces vestiges. Roqueberte me dit que les savants du pays se disputent là-dessus depuis cinquante ans, et moi, je donne raison à ceux qui pensent que la margelle du puits était la bouche aux oracles du dieu. L’orifice de ce puits immense, auquel communique bizarrement un autre puits plus petit, était fermé par une tête colossale d’un grand style, et dont la bouche percée laissait passer, dit-on, la voix souterraine des pythies. Pourquoi non ? Ceux qui disent que c’était seulement