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« J’ai trouvé une petite fille de dix ans pour m’ouvrir la porte ; mais quand j’ai demandé à voir la Roqueberte, l’enfant m’a répondu en pleurant que sa mère se mourait. J’ai couru à la partie du manoir encore debout et bien réparée qu’elle habite, et je l’ai trouvée en proie à une fièvre cérébrale. Le petit Didier jouait dans la chambre avec un autre enfant de cette pauvre femme, celui-ci très-gai, ne comprenant rien, quoique plus âgé, tandis que Didier, demi-souriant, demi-pleurant, regardait du côté du lit d’un air étonné, avec autant d’inquiétude qu’en peut montrer un enfant de trois ans. Quand il m’a vue, il est venu à moi, et au lieu de faire le coquet pour m’embrasser, comme il avait fait la première fois, il s’est jeté après ma robe, en me tirant avec ses petites mains et en me disant maman ! d’une voix si plaintive et si douce que tout mon cœur en a été bouleversé. Il m’avertissait, à coup sûr, de l’état incompréhensible de sa mère adoptive. Je me suis approchée du lit. La Roqueberte ne pouvait parler, elle ne reconnaissait personne. Son mari est arrivé au bout d’un instant, et a commencé à s’inquiéter, car elle n’était ainsi que depuis quelques heures. Je lui ai dit qu’il était temps d’envoyer chercher un médecin et une femme pour garder la sienne, ce qu’il a fait aussitôt, et comme je ne savais pas trop s’il n’y avait pas de la fièvre typhoïde, j’ai emmené les enfants hors de la chambre, en avertissant le mari du danger de les y laisser.

« Quand le médecin est arrivé au bout de deux