Page:Sand - Le Marquis de Villemer.djvu/28

Cette page a été validée par deux contributeurs.

trouble, la maternité se réveilla, et la crise passionnée qui lui fit ressaisir et caresser en pleurant ses deux fils lui rendit les droits de sa raison et l’empire de sa volonté. Elle resta malade, infirme, vieille avant l’âge, un peu bizarre à certains égards, mais très-énergique dans sa conduite, très-grande dans ses affections et très-noble dans tous ses rapports avec le monde. On la remarqua dès lors pour son esprit, qui avait été longtemps comme endormi dans le chagrin et dans l’amour, et qui se montra enfin dans le courage.

Tout ce qui précède établit suffisamment sa position. Nous laisserons maintenant Caroline de Saint-Geneix apprécier comme elle l’entendra la marquise et ses deux fils.


LETTRE À MADAME CAMILLE HEUDEBERT.


Paris, 15 mars 1845.

Oui, chère petite sœur, je suis très-bien installée, comme je te l’ai dit dans mes précédentes lettres. J’ai une jolie chambre, un bon feu, une belle voiture, des domestiques, une table assez succulente. Il ne tient qu’à moi de me croire riche et marquise, puisque, ne quittant presque pas ma vieille dame, je suis nécessairement associée à tout le confortable de sa vie.

Mais tu me reproches de t’écrire des lettres bien courtes. C’est que, jusqu’à présent, j’ai eu fort peu