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tous ces jours de fête, lui dit-elle ; ce ne sera rien. Ayez l’obligeance de me lire mes lettres.

Pendant que Caroline lisait, madame de Villemer n’écoutait pas. Elle pensait à ce qu’elle allait faire. Elle contenait une profonde indignation contre cette jeune fille, un violent chagrin du coup qu’il lui faudrait porter au marquis, et à ces souffrances de la mère se mêlait cependant l’involontaire satisfaction de la grande dame dégagée d’une parole qui lui avait coûté, et que, depuis douze heures, elle ne se retraçait pas sans effroi.

Quand elle eut pris son parti, elle interrompit brusquement la lectrice en lui disant d’un ton glacial : — C’est assez, mademoiselle de Saint-Geneix, j’ai à vous parler sérieusement. Un de mes fils, je trouve inutile de dire lequel, a paru éprouver pour vous, dans ces derniers temps, des sentiments que vous n’avez certainement pas encouragés ?

Caroline devint plus pâle que la marquise mais, forte de sa conscience, elle répondit sans hésitation : — J’ignore ce que vous me dites, madame. Aucun de vos fils ne m’a jamais exprimé aucun sentiment dont je pusse m’alarmer sérieusement.

La marquise prit cette réponse pour un effronté mensonge. Elle lança à la pauvre fille un regard de mépris et garda un instant le silence puis elle reprit : — Je ne vous parle pas du duc, il est tout à fait inutile de vous défendre sur ce point.

— Je ne me plains ni de lui ni de son frère, répondit Caroline.