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bien que, depuis quelques jours, vous m’évitez ; ne le niez pas ! ajouta-t-il en voyant qu’elle allait répondre. Vous avez pour cela des raisons que je respecte, mais qui ne sont pas fondées. En vous parlant de moi, comme je me suis permis de le faire au jardin des Plantes, j’ai effrayé la délicatesse de votre conscience. Vous avez cru que j’allais vous prendre pour confidente de quelque projet personnel de nature à troubler la paix de ma famille, et vous ne voudrez pas être la complice, même passive, de ma révolte.

— C’est précisément cela, répondit Caroline, et vous avez très-bien deviné ce qui se passait en moi.

— Que ce que je vous ai dit soit donc non avenu, reprit Urbain avec une fermeté calme qui imposait le respect de sa parole : je ne vous dirai pas de l’oublier, mais je vous prie de ne vous en préoccuper en aucune façon et de ne pas craindre que je mette votre attachement pour ma mère aux prises avec l’amitié généreuse que vous avez daigné m’accorder.

Caroline dut céder à l’ascendant de la franchise. Elle ne comprit pas tout ce qui se passait dans l’esprit du marquis, tout ce qu’il y avait d’arrêté en lui au delà de ses paroles. Elle crut qu’elle s’était trompée, ou qu’elle s’était trop alarmée d’une velléité dont il avait déjà su triompher. Elle accepta en elle-même la promesse de son ami comme une réparation formelle d’un instant de trouble dans sa pensée, et dès lors elle retrouva tout le charme, toute la sécurité de l’amitié.