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nous voyez, … non, encore plus beaux, car il y avait sur nos physionomies cet air de conquête qui sied si bien à mon frère, et auquel je m’essayais pour la première fois, mais qui, vous l’allez voir, ne m’a point du tout réussi.

— C’est-à-dire, reprit le duc, que tu avais l’air prodigieusement distrait, et que, pour commencer, tu as regardé un portrait d’Anne d’Autriche nouvellement placé dans le salon de la duchesse, au lieu de regarder mademoiselle de Xaintrailles.

— Ah ! dit la marquise en soupirant, il était donc bien beau, ce portrait ?

— Très-beau, répondit Urbain. Vous me direz que ce n’était pas le moment de m’en apercevoir mais vous allez voir comme c’est heureux que cela me soit arrivé ! Mademoiselle Diane était assise au coin de la cheminée avec mademoiselle de Dunières et deux ou trois autres filles de haute race plus ou moins anglaise. Pendant que mes yeux distraits s’accrochent au visage rondelet de la feue reine, mon frère, croyant que je suis sur ses talons, va droit, en qualité d’aîné, saluer d’abord la duchesse, puis sa fille, et collectivement le jeune groupe, en reconnaissant tout de suite, d’un œil d’aigle, la belle Diane, qu’il n’avait pas vue depuis l’âge de cinq ans. Ayant promené son beau sourire dans ce coin privilégié et traversé les autres groupes avec cette élégance à la fois modeste et triomphante qui n’appartient qu’à lui, il revient vers moi, qui commençais mon évolution vers la duchesse, et